M. Paul Christophe appelle l’attention de Mme la secrétaire d’État, auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur l’impact pour l’environnement, le climat et la santé de l’accord économique et commercial global, dit CETA (Comprehensive economic and trade agreement). Le CETA, traité international de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada signé le 30 octobre 2016, prévoit la réduction des droits de douane réciproques de 98 % et lève les restrictions en matière d’accès aux marchés publics. Il renforce également la coopération entre l’Union européenne et le Canada en termes de normalisation et de régulation. Ce traité promet ainsi des effets positifs pour le commerce des États membres de l’Union, mais suscite également de vives inquiétudes parmi des organisations non gouvernementales (ONG) et des syndicats agricoles. Ils craignent notamment un abaissement des normes sanitaires et environnementales, et redoutent une concurrence accrue entre secteurs agricoles. Sensible à ces inquiétudes, le Premier ministre a missionné, dès sa prise de fonction, une commission d’évaluation, présidée par Katheline Schubert, chargée de produire un rapport sur l’impact sanitaire et environnemental de l’accord. La commission a rendu son rapport le 8 septembre 2017. Dans celui-ci, elle émet de nombreuses réserves quant aux conséquences positives du CETA. Sur le plan environnemental, les experts regrettent le manque d’ambition de l’accord qui ne contient aucun engagement contraignant. Ils soulignent également une incertitude quant à la possibilité, pour l’Union européenne, d’invoquer le principe de précaution lors de futurs litiges, faute d’une mention explicite dans le traité. Le CETA semble, de ce fait, incompatible avec l’Accord de Paris sur le climat que défend le Gouvernement. S’agissant des importations de produits, les experts craignent que la libéralisation des échanges agricoles n’oblige l’Union européenne à s’aligner sur les normes canadiennes, moins exigeantes en matière d’utilisation de pesticides ou d’activateurs de croissance (hormones, antibiotiques). Le rapport souligne également le possible obstacle à la transition écologique de l’agriculture en Europe que pourrait constituer l’accord. Ainsi, au vu du rapport, le CETA, qui est entré en vigueur le 21 septembre 2017, comporte encore de nombreuses zones d’ombre qui inquiètent, à juste titre, les ONG et syndicats. Par conséquent, il souhaiterait pourquoi le Gouvernement n’a pas retardé l’entrée en vigueur de l’accord. Il souhaiterait également connaître les suites que le Gouvernement entend donner au rapport et notamment savoir si les recommandations formulées seront très concrètement mises en œuvre.

Réponse la secrétaire d’État, auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire :

L’accord économique et commercial global (AECG, en anglais CETA) entre l’Union européenne et le Canada est entré en vigueur de manière provisoire le 21 septembre 2017, la ratification du Parlement français, prévue au 2ème semestre 2018, étant nécessaire à l’entrée en vigueur définitive de cet accord. Afin de clarifier les incertitudes sur l’impact attendu de cet accord sur l’environnement, le climat et la santé, le Gouvernement a demandé à une commission de personnalités expertes et indépendantes présidée par Katheline Schubert d’en analyser le contenu. Le Gouvernement a ensuite élaboré, en associant les parties prenantes (ONG, filières économiques, etc.), un plan d’action qu’il a présenté le 25 octobre. Ce plan d’action s’articule autour de trois axes : I) assurer une mise en œuvre exemplaire de l’AECG/CETA ; II) des actions complémentaires au CETA pour renforcer la coopération bilatérale et multilatérale sur les enjeux climatiques ; III) des propositions sur la politique commerciale européenne pour améliorer la prise en compte des enjeux sanitaires et de développement durable dans les accords commerciaux de l’Union européenne. L’objectif pour les futurs accords et les accords en cours de négociation est plus généralement de profondément renouveler, changer la politique commerciale de l’Union européenne, conformément aux déclarations du Président de la République dans son discours sur l’Europe à la Sorbonne le 26 septembre dernier : « Nous ne voulons plus de nouvelles discussions commerciales avec les règles d’hier, qui nous ont conduits à ces situations absurdes que nous avons aujourd’hui sur l’accord entre l’Europe et le Canada. Nous avons besoin d’avoir une transparence des négociations et de la mise en œuvre des accords commerciaux. Nous avons besoin d’une exigence sociale et environnementale dans nos débats commerciaux. » Cette ambition est inscrite dans le Plan Climat de la France (axes 15 et 23) et dans l’axe 3 du plan d’action CETA. S’agissant des craintes portant sur la libéralisation des échanges agricoles, le plan d’action prévoit pour le CETA et les prochains accords commerciaux une série de mesures visant à :mieux analyser l’impact des accords commerciaux sur le développement durable (y compris dans le secteur agricole) ; défendre le modèle européen de production agricole, ainsi qu’une application rigoureuse des normes sanitaires et phytosanitaires européennes, renforcer les dispositifs de lutte contre la fraude et le respect des normes européennes par toutes les importations ;améliorer l’information du consommateur. Enfin, il prévoit également d’accompagner les négociations commerciales par des mesures de coopération avec les pays partenaires de nos accords sur les enjeux agricoles. Sur les aspects environnementaux, le plan d’action contient plusieurs mesures dont la mise en œuvre a déjà commencé. Il prévoit par exemple la mesure et le suivi de l’empreinte carbone du CETA, la mise en œuvre d’un véto climatique pour les différends investisseurs-États, une coopération bilatérale avec le Canada sur plusieurs enjeux climatiques (prix du carbone, réduction des émissions du transport international, etc.), et de nombreuses dispositions visant à renforcer la prise en compte des enjeux environnementaux et notamment de l’Accord de Paris dans les futurs accords.